Art de vivre - Immobilier
Immobilier de prestige, 50 nuances de luxe
Vue, piscine, personnalisation, services, domotique… il faut de tout pour plaire aux plus exigeants
Dans l'immobilier de luxe, le diable se cache dans les détails. Si la vue, l’emplacement du bien ou la qualité du voisinage constituent des critères cruciaux lors de l’acte d’achat, d’autres aspects plus originaux peuvent parfois emporter la décision. Entrer dans une demeure rénovée du sol au plafond sera par exemple très attractif pour des acheteurs allergiques aux travaux. Une piscine, une salle de sport ou de billard dans l’appartement, la maison ou simplement l’immeuble, pourront aussi jouer un rôle décisif. Enfin, la domotique et la présence de services associés pèseront également dans la balance.
par Fabien Humbert
Pour quelles raisons opte-t-on un 200 m2 avenue Montaigne plutôt qu’un 200 m2 boulevard Saint-Germain ? Comment choisir entre deux chalets à Courchevel, entre deux maisons sur la Côte d’Azur ? Pourquoi un futur propriétaire aura-t-il le coup de cœur qui lui fera dépenser plusieurs centaines de milliers d’euros, voire plusieurs millions pour un appartement ou une maison ? Et qu’est-ce qui donnera l’impression à un acheteur de basculer dans le luxe ? Pour Elie Barrau, architecte de son état, c’est d’abord dans la conception du bâtiment et la durabilité de l’ensemble qu’il faut chercher les causes. “Nous voyons beaucoup de belles demeures ou d’immeubles sortir de terre et proposer des immeubles d’exception au niveau de la vue, des dimensions, de la localisation, mais qui sont construits avec des matériaux qui ne sont pas vraiment durables, prévient-il. Ce type de bien se détériorera rapidement, et des travaux devront être à nouveau entrepris au bout de 10 ans d’occupation.” Un peu comme une photo argentique qui jaunit avec le temps.
La durabilité et la qualité des matériaux utilisés ne sont pas seulement cruciales lors de la construction du bien, mais aussi lors de la conception de l’intérieur. “Certaines personnes dépensent des sommes faramineuses pour se faire construire de grands espaces, mais économisent sur les finitions, explique Elie Barrau. Or le luxe, qui pourrait bien au final décider un potentiel acheteur lors de la revente, c’est de faire appel à de très bons artisans qui vont par exemple vous faire tous vos meubles sur mesure.” Lorsqu’on vend un bien, même un bien d’exception, la tentation est grande de le faire visiter en l’état, ou de passer un petit coup de peinture pour le rendre présentable. Pourtant, entre une maison refaite à la va-vite, à la home staging, et l’autre rénovée avec soin, rien de comparable. Ceux qui pensent que changer complètement la cuisine, la salle de bains ou les sols pour les rendre impeccables est une perte de temps et d’argent, se trompent. “Même s’il décide plus tard de faire des travaux, l’acheteur sera séduit par un appartement dans lequel il n’aura qu’à poser ses valises, estime Karin Maxwell, fondatrice et associée chez MaxwellStorrieBaynes. Il est par ailleurs important que la qualité de la maison se voie sur les photos de l’annonce, ne serait-ce que pour convaincre les clients de venir la visiter.” Ainsi, ce sont plutôt les biens spacieux aux intérieurs dépouillés, très design, qui attirent actuellement l’attention des riches acheteurs. “En tant qu’architectes, nous nous efforçons de travailler sur les espaces et la luminosité, car c’est aussi là que réside le luxe”, confirme Elie Barrau.
La vue, encore et toujours
Outre les jolies photos, la localisation incitera un acheteur potentiel à venir visiter. Certains ultras riches ont en effet une démarche de collectionneurs. Ils vont collectionner des propriétés dans de belles adresses comme ils vont collectionner des montres ou des tableaux. Il leur faudra une propriété à Saint-Jean-Cap-Ferrat, une autre avenue Montaigne, une autre à Courchevel. Certains collectionneront les propriétés aux adresses prestigieuses, situées à Saint-Jean-Cap Ferrat, avenue Montaigne ou Courchevel. Le voisinage, lui aussi important, devra être sécurisé et inspirer confiance. L’état général de la copropriété sera pris en compte : propreté, présence d’un ascenseur, d’un tapis dans les escaliers, de plantes dans les cours intérieures, caméra de surveillance, vigile, gardien… Aucun détail ne sera négligé.
Cependant l’adresse ne suffit pas. En effet, un appartement de 200 m2 sur rue au premier étage d’un immeuble avenue Montaigne ne sera pas forcément considéré comme un bien de prestige, contrairement à celui situé au dernier étage. La différence ? La vue, qui demeure le premier critère d’un bien haut de gamme, voire de luxe, et ce qui emportera la décision de l’acheteur. “L’achat immobilier est d’abord un acte émotionnel, un coup de cœur, estime Laurent Demeure, président de Coldwell Banker France et Monaco. Et qu’est-ce qui, de manière générale, fait craquer les acheteurs ? La vue.” Un panoramique, depuis une colline, sur la mer ou une rivière lorsque le bien mis en vente est une maison. Une vue dégagée sur un des monuments emblématiques de la capitale (tour Eiffel, Panthéon, jardin du Luxembourg…), ou sur la Seine. “On parle de vue majeure pour cet effet carte postale, explique Hugues de la Morandière, directeur associé à L’agence Varenne. D’une manière générale, les vues aériennes et panoramiques feront pencher la balance, car elles nous donnent le sentiment de pouvoir échapper aux tensions et à la densité de la vie citadine.” C’est pourquoi les ouvertures sur les toits ou les appartements sur jardins privatifs peuvent déclencher l’acte d’achat. Une vue peut donc transformer, presque à elle seule, un bien lambda en un bien de luxe, pour peu qu’il soit aménageable. “Par exemple, nous avons vendu un appartement qui se trouvait dans un immeuble standard qui n’avait rien de luxueux à un milliardaire russe, raconte Laurent Demeure. Il était au 12e et dernier étage, avec une terrasse à 360° qui domine Paris. L’acquéreur l’a ensuite transformé en logement de luxe.”
Place aux aménagements de loisir
Parfois l’accessoire fera pencher la balance en faveur de l’achat, un aménagement imaginé par le précédent propriétaire qui aura conquis le suivant. Dans une maison, une piscine ne représente pas un critère déterminant. Trop banale, elle peut être construite facilement pour peu qu’on ait suffisamment de terrain. En revanche, à Paris, le même accessoire peut emporter la décision. Il est ainsi de plus de plus fréquent de trouver des piscines dans les sous-sols des hôtels particuliers parisiens, même si les autorisations de constructions ne sont pas faciles à obtenir. Les appartements au dernier étage avec piscine sont eux aussi présents dans la capitale. Mais pour certains, cela est encore trop commun. “J’ai vu un appartement new-yorkais où le salon se transformait en piscine car le sol de la pièce s’ouvrait pour faire émerger un bassin, raconte Laurent Demeure. C’est bluffant, même quand vous avez beaucoup d’argent.”
Une salle de jeu ou de billard représente aussi des équipements pouvant à la marge faire le bonheur d’un futur acheteur. Tout comme la salle de projection privée, un aménagement qu’on croise de plus en plus souvent dans l’univers des biens de prestige. Les salles de sport avec appareils de musculation ou de running sont elles aussi très prisées, ainsi que les spas ou les garages pour loger les voitures de collection. D’autres agencements plus originaux commencent à se multiplier, notamment dans les suites parentales. Par exemple, les suites avec deux salles de bains sont assez recherchées. “J’ai vu une propriété à Miami où la suite parentale, qui mesurait 300 m2, comportait une cuisine pour que les parents n’aient pas à traverser la maison quand ils avaient un petit creux pendant la nuit”, confie Laurent Demeure. En fait, la clientèle de luxe veut de multiples choses. Il lui faut non seulement la piscine, mais aussi le tennis, le garage pour les trois voitures, le portail électrique quand il s’agit d’une maison ; la salle de sport, la terrasse, le billard, la suite parentale quand il s’agit d’un appartement. De fait, la clientèle de luxe est susceptible de désirer aussi bien une piscine qu’un court de tennis, un garage pour trois voitures, un portail électrique, une salle de sport, une terrasse, un billard ou une suite parentale. Autres éléments qui ne sont pas une nouveauté à l’étranger mais qui apparaissent en France : les panic room (pour pièce de sûreté, de survie) connues grâce au film éponyme avec Jodie Foster sorti en 2002. Elles sont désormais conçues pour être complètement indétectables, cachées, bénéficient d’une liaison satellite et contiennent de quoi vivre plusieurs jours.
Contrôle à distance et services
Certains aménagements vont cependant encore plus loin pour séduire une clientèle exigeante. La domotique représente la première de ces nouvelles tendances. Cela fait plusieurs années déjà que l’on parle des maisons intelligentes, mais peu de temps en fait que ces technologies sont utilisées dans l’immobilier de luxe, en tout cas parisien. “Tous les nouveaux immeubles, que ce soit à New York ou à Dubaï, sont équipés en domotique. C’est pourquoi les acheteurs étrangers y sont habitués et donneront l’avantage aux rares biens qui, en France, ont adopté cette technologie” analyse Hugues de la Morandière. Pouvoir gérer l’ensemble des fonctions de son appartement ou de sa maison – lumière, sono, options de sécurité… – grâce à des écrans présents dans toutes les pièces, ou même via son smartphone, constitue de fait un luxe. “Il est même possible de contrôler son spa à distance”, note Laurent Demeure.
Dernière tendance des nouvelles constructions de luxe de par le monde : l’offre de services. Le sous-sol de ces nouveaux immeubles abrite de plus en plus souvent des prestations qui s’apparentent à ce que vous trouveriez dans un hôtel ou un club privé : piscine, restaurant, spa… “Certains vont jusqu’à proposer des salons privés qui permettent aux habitants d’y organiser des fêtes ou des dîners. La cuisine et le service sont assurés par le personnel de l’immeuble”, révèle Laurent Demeure. Le résident n’a donc pas à transformer son intérieur et à le ranger après un tel événement. Les étrangers qui ne passent pas toute l’année à Paris apprécient. Cela leur évite d’avoir à s’inscrire à une salle de sport ou d’appointer du personnel épisodiquement. Pourtant, peu d‘immeubles peuvent encore se prévaloir de ces équipements en France.